PRÉFACE

Création le 29 septembre 2016

Bien que les noms de lieux et de personnes ne soient pas dévoilés, l’histoire du sous-lieutenant François Delorme, qui en 1961 était mon voisin dans l’ouest-Constantinois, ne relève pas de la fiction. Dans un village relativement tranquille, qui tire profit de la présence militaire, il remplit avec efficacité les fonctions de chef de SAS. Il maintient le contact avec la population en multipliant foyers féminins et sportifs. Une attachée de  SAS, super active, développe l’assistance médicale. Combinant choufs et patrouilles à cheval, ses moghaznis découvrent les caches et le «trésor» de l’OPA. Des travaux de pistes sont menés à bien malgré les mots d’ordre de grève.

Ce qui est original, et même atypique dans son témoignage, c’est qu’il se situe après le putsch d’avril 1961, au moment où la politique est manifestement celle du dégagement. Après avoir assisté à la grande pagaille de la mobilisation populaire en banlieue parisienne, notre ami ne se fait plus d’illusion sur le maintien de l’Algérie française. Sans considération pour les directives officielles, il organise le ramassage scolaire dans les douars qui lui sont hostiles, et récupère une famille en zone d’insécurité. Il s’efforce alors de préparer la population au changement inéluctable ... et de construire avec elle un avenir pacifique auquel pourraient se rallier des indépendantistes intelligents, en coopération avec la France.

Il obtient même du responsable départemental du FLN d’assister à la célébration de l’indépendance ... où il constate l’absence d’animosité anti-française de la foule. Il imagine alors ce qui aurait pu se passer si en 1958 le général de Gaulle, plutôt que de s’attacher à refaire les institutions françaises, s’était installé à Alger pour faire la paix.

Ce rêve d’une vraie pacification est malheureusement compromis par la volonté d’épuration et de domination du clan qui a pris le pouvoir, et des petits chefs locaux qui les suivent, sans aucun souci des aspirations du peuple algérien. Chargé de démanteler les SAS de son secteur, François Delorme s’emploie désormais à procurer des contrats d’embauche en métropole pour ses moghaznis.
 
Le sens de l'humain reste sa priorité.

Général (2S) Maurice Faivre

Vice-président de la commission française d’histoire militaire, membre de l'Académie des Sciences d'Outre-mer.